A l'office du dimanche [Hélios]

La sortie du coma avait été rude. Il avait perdu trois mois de sa vie avec tous ses souvenirs quant à l'agression. Pour lui qui aimait avoir le contrôle sur tout, c'était déjà très compliqué. Mais il avait fallu rajouter à cela le fait qu'il s'était réveillé "papy" d'un gamin qu'il n'avait jamais vu, ni même jamais entendu parler. Et qu'il aurait dû selon les désirs de sa fille, adopter sur l'instant et le plus naturellement du monde... Il l'avait aussitôt rejeté aussi violemment qu'il l'avait fait avec sa fille lors du décès de Marie et de Brian. Mais Dieu, comment aurait-il pu faire avec cet enfant qui n'était même pas un Davidson ?... Bien sûr, seules les paroles du sermon du père Cavendish lui parvint comme réponse... Mais il s'estimait suffisamment pécheur pour ne pas avoir droit à une connexion directe avec Dieu. De toute évidence, et aussi difficile que cela puisse paraitre, Lance Davidson n'avait pas droit à tout.

Mais cela n'entamait en rien sa foi, au contraire même. Dieu lui avait offert le plus beau des cadeaux. Un autre fils, portant en son sein le cœur du premier. Et ce ne pouvait être qu'un cadeau divin, peut-être même avec la bénédiction de sa femme et de Brian. C'était du moins ce qu'il voulait croire... Miguel qui ne l'avait pas lâché depuis sa sortie de l'hôpital, le traitant comme une princesse, comme s'il était... Joey ! Sauf ce matin où après avoir passé sa nuit à jouer en ligne avec Grincheux, il dormait comme un bébé au bunker. Et lui était venu ici pour remercier de tous les bienfaits reçus et faire amende honorable quant à cet enfant qu'il n'arrivait pas à appeler petit-fils. Il avait une autre famille après tout et il lui souhaitait le meilleur avec sa mère adoptive, sa vraie mère. Un jour, lorsqu'elle aura ses propres enfants -dans beaucoup d'années, il n'était pas si vieux pour se faire appeler "papy"- sa fille comprendra cela.

Et alors que le sermon touchait à sa fin, et au moment où le père Cavendish donnait des informations sur les événements de la paroisse, il eut la surprise d'entendre un petit mot à son sujet. "...Et je voudrais terminer cet office en souhaitant un bon retour parmi nous à un homme qui s'est toujours beaucoup investit au sein de notre paroisse, Monsieur Davidson qui après une agression et de longues semaines de coma, nous revient par miracle en parfaite santé." Souriant aux visages plus ou moins connus qui se tournaient vers lui, il attendit finalement que tout le monde se lève pour le faire à son tour et se diriger vers le père Cavendish qui se trouvait déjà être en pleine discussion avec un homme qu'il n'avait encore jamais vu ici. Comme quoi il ne suffisait que de trois mois pour se sentir perdu dans sa propre église ! "Ah, Monsieur Davidson, venez que je vous présente Monsieur O'Brien qui a rejoint notre paroisse pendant votre coma. Cette affreuse agression que vous avez subit, c'est tout de même incroyable toute cette violence de nos jours..." Le père Cavendish avait à n'en pas douter le cœur sur la main mais il était aussi celui à qui il fallait s'adresser pour diffuser une information... Que vous le vouliez ou non ! "C'est un plaisir de vous compter parmi les membres de notre petite communauté..." Et sans doute qu'il aurait rassuré une nouvelle fois le prêtre si celui-ci n'avait pas eu mieux à faire auprès de quelqu'un d'autre. "Je vais vous laisser, je dois aller voir Madame Donnels, son mari vient de décéder de son cancer. Un décès reste toujours difficile, même à 82 ans." Laissant le prêtre s'éloigner, il se tourna enfin vers son interlocuteur, dont il avait déjà oublié le nom. "J'imagine que le Père Cavendish a tenté de vous faciliter au mieux l'intégration dans notre église ?... Il peut être très volubile parfois, mais il est aussi très actif pour apporter de l'aide aux plus démunis. Et c'est bien tout ce qui importe en définitive." Parce qu'il ne doutait pas que ce Monsieur "O'quelque chose" avait dû recevoir un accueil digne de celui de son propre retour...

Oeuvre de charité.

@Catelyn Stephenson

J'étais ravi, les choses commençaient à bien se mettre en place au cabinet, quelques avocats étaient partis, je ne leur avais pas couru après ce n'est pas du tout mon genre et personne n'est irremplaçable. J'avais recruté de nouvelles têtes et j'avais mis un coup de jeunesse et de peps dans ce cabinet qui rouillait un peu. J'avais aussi recruté une nouvelle Baby-sitter pour Maé et cela se passait très bien, j'en étais rassuré, je laissais à cette femme mon "bien" le plus précieux. La précédente s'occupait bien de ma fille, mais elle aurait aimé s'occuper bien de moi aussi, j'avais donc mis fin au contrat. Je n'étais pas le genre d'homme à se taper mes employées et encore moins la baby-sitter de la fille. Enfin bref, avec tout cela de régler, c'était un petit poids un moins sur mes épaules.

Nous étions dimanche matin et comme chaque dimanche matin nous partons pour la messe. Ce n'est pas toujours facile de se lever le dimanche matin, surtout quand nous nous couchons tard la veille. Mais bon, je suis du genre à bien tout prévoir, donc je me lève avant ma fille, je me prépare, car qui dit messe, dit que l'on doit bien s'apprêter. Je prépare les vêtements de Maé ainsi que son petit-déjeuner, puis je vais la réveiller.

Au moment des annonces, à la fin de la messe, le Père Cavendish fait une belle annonce, le fameux Lance Davidson est de retour parmi nous. Je ne connaissais pas cet homme, mais j'en avais entendu parlé au moment de mon arrivé dans la paroisse. Chaque semaine, il y avait une pensée pour lui, car il était dans le coma à la suite d'une agression. Une fois les annonces passées, je laisse ma fille partir pour le catéchisme et je rejoins le Père Cavendish, qui m'avait demandé de l'aide pour mettre en place des heures de permanence en conseil juridique, afin d'aider les paroissiens qui ne pouvaient pas se payer les frais d'un avocat. C'est aussi l'occasion pour moi de faire la connaissance de Monsieur Davidson, le Père nous présente l'un à l'autre. « Ravi de faire enfin votre connaissance. » Je lui tends la main et nous nous serrons la main. « C'est un plaisir d'avoir rejoint votre communauté... » J'avais eu un très bonne accueille et je m'y sentais très bien et très à mon aise.

Le Père Cavendish nous laisse alors tous les deux, pour rejoindre Madame Donnels. « Et il y est très bien arrivé, la communauté m'a offert un très bel accueil. » Ma fille était comme un poisson dans l'eau et j'avais l'impression d'être parmi eux depuis toujours. « Il a en effet beaucoup d'énergie et le cœur sur la main, ma fille est très contente quand il anime le catéchisme. » Il était très moderne, tout en préservant de grande valeur. Je pose alors mon regard sur Lance Davidson. « Et sinon...comment vous sentez vous? »

(c) princessecapricieuse

Le "enfin" le surprit autant qu'il le fit tiquer. Visiblement, le Père Cavendish avait fait plus d'une annonce à son sujet. Ce qui n'était finalement guère étonnant parce qu'hormis le fait qu'il était un généreux donateur pour la paroisse, le Père Cavendish tenait à ses ouailles comme aux enfants qu'il n'avait pas. Et il avait lui-même fait plusieurs fois l'analogie dans ses sermons ! "Enfin ma connaissance... J'en conclu donc que vous n'êtes pas arrivé hier. Mais je suis ravi de savoir que vous avez été bien accueilli. Et moi, de m'être réveillé !" Parce qu'il avait tout de même perdu trois mois dans toute cette histoire. Trois mois de sa vie, et surtout sa Princesse... Ou plutôt l'image qu'il avait de sa fille. Parce que de toute évidence, leur "rapprochement" n'avait été lui aussi qu'un mensonge de plus. Et c'était bien cela qui était le plus difficile à admettre. Parce qu'il y avait cru alors que Kara lui mentait pendant tout ce temps, et en le regardant droit dans les yeux.

Et sans doute que ces réflexions, il se les ferait à chaque fois qu'un père lui parlerait tendrement de sa fille... "J'ai une fille moi aussi, mais elle a depuis longtemps passé l'âge du catéchisme. Et parfois, je le regrette." Et il ne pouvait même pas dire que c'était le bon vieux temps puisqu'il n'avait pas été là à ce moment-là. "Les enfants grandissent trop vite, et il arrive qu'on se sente parfois totalement dépassé." Et il l'avouait sans honte après la "surprise" que sa fille lui avait réservée à son réveil ! Une surprise qu'il ne souhaitait d'ailleurs à personne.

Quant à la réponse à la question posée, elle était bien plus complexe qu'il n'y paraissait. Parce qu'il allait très bien, hormis les nouveautés qu'il découvrait tous les jours... "Oh, je vais très bien. Juste... J'en suis resté à il y a trois mois, aussi bien pour la date que pour les informations à la télé. Et c'est incroyable comment les choses peuvent évoluer en trois malheureux mois. Je n'ose imaginer ce qu'il doit en être pour ceux qui se réveillent au bout de dix ans." Mais n'étant pas du genre à se laisser abattre -et on pouvait le dire au propre comme au figuré !- il avait vite rattrapé son retard, surtout pour tout ce qui concernait la situation géopolitique, fer de lance de la Nanot. Même s'il restait encore parfois saisi par certains changements inattendus. Bien plus souvent en fait qu'il n'aurait voulu se l'avouer. "En vérité, vous avez l'impression d'être tombé dans un monde parallèle. Avec les mêmes personnes mais dans des situations totalement différentes... Mais ça vous ouvre aussi les yeux sur certaines choses, des négatives comme aussi beaucoup de positives. Même si je ne souhaiterais ça à personne !" Souriant d'une façon plutôt fataliste puisque c'était le genre d'événement qu'on ne choisissait pas, il s'intéressa à d'autres choix, et bien plus volontaires ceux-là ! "Et donc, qu'est-ce qui vous a amené dans notre belle ville ?" Après tout, lui n'avait pas grand-chose à raconter, il avait passé ces trois derniers mois à dormir !

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